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Erreur n°3 : Nier la spécificité de la question

La crise économique aidant, le recrutement des 18-30 ans devient (temporairement) moins problématique et nous assistons à une floraison d’articles dans la presse ou les blogs qui remettent en cause le concept de la génération Y ou nient sa spécificité.

Florilège :

« Mais où est passée la génération Y ? » Observatoire des jeunes actifs)

« Tous les Y ne correspondent pas à la description qu’on en fait généralement. Dans mon entreprise, il y en a également beaucoup. Et ils ne sont pas si différents que cela » (commentaire  dans “La grande blague de la Génération Y ! Ne vous faites pas avoir!”)

« […]  La génération Y avec des responsabilités, des enfants, face au chômage, …, s’adaptera et reviendra dans une attitude “normale” » (La grande blague de la Génération Y ! Ne vous faites pas avoir! »)

Ouf ! Me voilà rassuré.
J’ai cru qu’avec cette Génération Y,  j’allais devoir  questionner  mes modes de management, trouver de nouvelles façons d’impliquer les jeunes, remettre en cause certaines grilles de lecture, bref réfléchir.  Rien de tout cela n’est nécessaire en fait. Les  “rebelles” vont rentrer dans le rang, revenir aux méthodes classiques et arrêter de perdre leur temps sur les réseaux sociaux…

Pardonnez à votre serviteur cette pointe d’ironie mais il était difficile de résister devant des propos aussi caricaturaux. Ils  font  penser à  ceux de certains dirigeants de maison de disque qui se refusent à remettre en cause leur business model en expliquant qu’un jour, les jeunes reviendront acheter des CD à 15 euros dans les magasins, comme avant.

Au-delà de la boutade, ce propos met en lumière un malaise profond de certains managers qui préfèrent  nier une réalité anxiogène plutôt que de s’y attaquer. Ce type de raisonnement,  bien connu des théoriciens de la conduite du changement (Cf. schéma ci-dessous), permet de diminuer le niveau de stress mais conduit inévitablement à…l’inertie stratégique qui me parait être l’un des principaux écueils en matière de gestion RH des 18-30 ans.

Cette posture de  « négation apaisante »  ne me paraît pas satisfaisante  pour plusieurs raisons :

D’une part, la Génération Y présente des caractéristiques propres, parfois en rupture avec les générations précédentes. Le premier exemple qui me vient à l’esprit est le lien très fort  avec le Web et  les nouvelles technologies.  Cette spécificité est aujourd’hui attestée par des études chiffrées .  Une autre spécificité notable de cette génération réside dans leur  mode de pensée très « horizontal » que j’ai déjà l’occasion de présenter dans cet article.
De plus, cette posture n’est à l’évidence pas durable. Les “nouveaux” comportements  des Y vont se massifier à l’occasion du basculement générationnel en cours dans les entreprises.  Songez qu’en 2014,  la Génération Y représentera 47% de la population active aux Etats-Unis…

Enfin, nier les spécificités d’une génération revient à se priver d’en exploiter les potentialités.  Or si la Génération Y a certes beaucoup à apprendre de l’Entreprise, je crois que la réciproque est vraie.

Je vous laisse avec une citation d’Alain :
“On dit que les nouvelles générations seront difficiles à gouverner. Je l’espère bien” . (Propos sur l’éducation - 1932)

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4 Réponses à “Gestion RH des 18-30 ans (Génération Y) : les 5 erreurs de base (3/5)”

  1. MayaNo Gravatar dit :

    Ce qui me frappe d’autant plus dans l’article cité c’est que c’est bien tout le contraire. Face à la crise, les Y dont je fais partie, ne se laissent pas épingler au tableau par des “et bien c’est la crise, un peu de solidarité, pas de progression salariale ou de nouveau poste” et le pire, c’est que ça marche : les Y sont les premiers à se remettre sur le marché en temps de crise ! Puisque le turn over et probablement une menace bien plus grande que de se retrouver avec des employés improductifs par manque de motivation salariales ou sociales, certaines DRH mises au pied du mur se rappellent que l’avenir appartient à qui décide de celui-ci, et il serait temps de s’y convertir de plein gré plutôt que de subir !

    Mais il faut croire que le principe de peter perdure encore et que les managers une fois assis dans leur fauteuil de cuir, pensent pouvoir jouir de leur nouveau statut d’incompétent sans se soucier de l’avenir…

  2. xavier aucompte dit :

    Tout d’abord merci pour votre article qui, même si je passe pour le vieux con qui ne comprend rien, reste dans la ligne de votre site très interessant. Merci aussi à Maya pour la petite claque supplémentaire mais là je suis moins d’accord.

    Pour revenir globalement sur votre article et le mien. Je n’ai jamais dit que la génération Y n’existait pas. Je n’ai pas dit qu’elle n’aurait pas son rôle à jouer dans la transformation de la société et de l’entreprise. Je n’ai pas dit non plus que les modèles d’achat n’avaient pas changés en musique (d’ailleurs, je n’en n’avais pas parlé…).

    Par contre, ma formation de juriste m’oblige à vous dire : regardez l’ensemble des pièces d’un dossier avant de donner votre avis. En l’espèce, nous avons d’une part un phénomène générationnel et d’autre part une révolution technologique. Tout cela dans un cadre très dur de crise.

    Les phénomènes générationnels ne sont pas nés avec la génération Y. Le plus médiatique est la génération 68. En total rupture avec son époque, elle a donné un énorme recul à la société qui a eu peur au moment de la crise. Les 68 sont rentrés dans les rangs parfois plus durs encore que leurs ainés. Ce n’est que 10 à 20 ans plus tard qu’ils ont joué un rôle de transformateurs de la société dans sa profondeur et ils sont beaucoup plus présent aujourd’hui dans nos pensées mais avec une idéologie de 68 passée au filtre de 30 ans de vie.

    Ainsi, nous devrions plus voir demain la transformation venir de la génération X qui a fait la société d’aujourd’hui et qu’on nommait la génération perdue il y a dix ans. Elle est aidé par les autres générations et c’est en cela que la magie existe.

    Cette génération Y profite d’une révolution technologique universelle jamais connue avant à ce ritme et avec ces effets. Ce n’est pas la génération Y qui joue à la wii dans les maisons de retraite, ce n’est pas la génération Y qui fait que la consommation sur le web décolle, ce n’est pas la génération Y qui a changé ses modes d’achats quotidiens avec le web mais bien la madame et le monsieur tout le monde.

    Ainsi, d’une étude poussée et interessante d’une génération, vous en faites une dictature générationnelle ou tout simplement un beau business pour vendre aux DRH des méthodes de recrutement limitées à la génération Y.

    Les chefs d’entreprise et les DRH que je vois tous les jours ont des générations Y mais ils ont aussi de tous les âges. Nier une génération une erreure, n’avoir qu’un focus sur une serait encore plus grave.

    Ensuite, comme vous le dites sur les australiens, la vraie vie va commencer pour ces Y. Dire qu’ils ne changeront pas face aux réalités de la vie avec le mariage et les relations amoureuses, avec la venue et la responsabilité d’enfants, avec le décès et le vieillissement de leurs parents, …, est un sophisme.

    Au contraire, ils vont évoluer et changer. Ils vont rentrer dans les rangs et à leur manière. Ils vont aussi renaître dans une nouvelle peau quelques années après. Leur évolution sera de toutes les façons très interessante.

    Mon article n’avait qu’un seul sens : arrêtons la mode génération Y et redevenons sérieux. Continuons à nous y interesser et agir mais la terre n’est pas peuplée que d’une génération.

  3. Julien Pouget (lagenerationy.com) dit :

    Bonjour Xaxier et merci pour votre commentaire. Vous faites preuve de franchise et c’est bien. Permettez-moi d’en faire autant.
    Une question me tarraude à la lecture de votre commentaire : seriez-vous par hasard un membre de la Génération X, jaloux de l’intérêt que suscite la Génération Y ? J’ai beau lire et relire votre commentaire, je ne peux m’empêcher d’y trouver un brin de frustration (“la terre n’est pas peuplée que d’une génération”, Ce n’est pas la génération Y qui [...], etc.). Si c’est le cas, sachez que je ne diminue en rien la contribution de la Génération X et de celles qui les ont précédées et que je ne suis pas responsable de la sous-exposition dont est victime la Génération X. Mais bon, je vais poursuivre sur le mode rationnel en mettant en perspectives certaines de vos remarques :
    Vous écrivez “Ainsi, nous devrions plus voir demain la transformation venir de la génération X” -> J’en doute fortement. Quelque soit l’intérêt que présente cette génération, son poids démographique est insignifiant au regard des baby-boomers où de la Génération Y. Or la taille compte. Si les Baby-Boomers ont marqué, c’est aussi en raison de leur taille…

    Vous écrivez “Ce n’est pas la génération Y qui joue à la wii dans les maisons de retraite, ce n’est pas la génération Y qui fait que la consommation sur le web décolle, ce n’est pas la génération Y qui a changé ses modes d’achats quotidiens avec le web mais bien la madame et le monsieur tout le monde -> A moins que vous ne disposiez de nouvelles statistiques générationnelles, ce que vous écrivez est erroné. En effet, les statistiques générationnelles actuelles sur les activités “online” le prouvent : la Génération Y est, de loin, la plus “online”. Comprenez-moi bien, il ne s’agit en aucun cas d’un jugement de valeur. Il serait idiot de conclure à la supériorité d’une génération sur une autre. Ceci étant dit, la réalité statistique est là. La constester suppose une argumentation plus solide que de simples affirmations.

    Vous écrivez ensuite “d’une étude poussée et interessante d’une génération, vous en faites une dictature générationnelle ou tout simplement un beau business pour vendre aux DRH des méthodes de recrutement limitées à la génération Y. Les chefs d’entreprise et les DRH que je vois tous les jours ont des générations Y mais ils ont aussi de tous les âges. Nier une génération une erreure, n’avoir qu’un focus sur une serait encore plus grave”. -> L’objet de mes articles n’est en aucun cas de nier les autres générations. Cette attitude serait contraire avec un des objectifs majeurs de ce blog qui de mieux comprendre les rapports générationnels. Ceci étant dit, je confesse sans problème ma passion pour la Génération Y. Cette dernière explique le tropisme du blog pour cette génération (qui n’a rien de mystérieux eu égard au titre du blog …”La Génération Y”). Quant aux accusations de mercantilisme (qui ne me gênent pas outre mesure) je les mets sur le compte d’une lecture incomplète du blog, qui traitent de bien d’autres sujets que le recrutement des jeunes (politiques, valeurs, logement, etc.).
    Nous ne tomberons vraisemblablement pas d’accord sur tout mais c’est toujours un plaisirs de débattre avec des blogeurs passionnés comme vous.
    A bientôt,
    Julien

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